En voiture dans Paris, me voilà arrêtée au feu rouge au croisement des rues de Tolbiac et Vandrezanne, à deux pas de la piscine de la Butte aux Cailles.
Je regarde alentours ce quartier, à l’époque populaire devenu « bobo » aujourd’hui, qui fut celui de mon enfance.
Rien n’a vraiment changé excepté bien sûr les enseignes des commerçants et un souvenir refait subitement surface : la boutique de Pat et Jackie !
Je me rappelle, à l’époque, m’être posée la question de qui était Pat et de qui était Jackie car je n’y ai jamais vu qu’une seule dame, toujours la même. Mais le mystère reste entier : était-ce Pat ou bien Jackie ???
Bref, me voilà donc projetée aux alentours de mes 10 ans, petite fille relativement sage et obéissante en surface mais déjà si rebelle pas loin dessous !
Ma mère s’était entichée de ce magasin de vêtements pour enfants où semble-t-il, seules trois couleurs avaient droit de cité : le bleu marine, le blanc et le rouge…la République Française, en somme, mais décliné en jupes, chemisiers, pulls…
Peut-être « Pat et Jackie » suivait-il la mode de l’époque ou faisait-il une fixette limite pathologique sur le drapeau tricolore ou bien il y avait d’autres coloris disponibles (probable) mais ma mère ne s’était focalisée que sur ces trois- là, qu’elle trouvait « chic » et de bon ton pour une petite fille de bonne famille…française, cela va sans dire !
Je penche pour cette hypothèse !!!
C’est peut-être en rapport avec ce désir, ce besoin vital même, de revendiquer son appartenance à ce pays qui l’a vu naitre, elle, mais pas ses parents. Il est toujours difficile d’être à la fois d’ici et issue d’ailleurs.
Mais revenons chez Pat et Jackie…
Je me revoie dans ce petit magasin sombre, peu large et tout en longueur où elle me trainait littéralement car je détestais y aller, sachant déjà que rien, absolument rien ne serait à mon goût.
La vendeuse (la patronne ?), que je trouvais guindée et peu avenante, n’avait d’attention que pour ma mère. Totalement indifférente à ma présence, elle me donnait le sentiment de n’être qu’une poupée qu’elles habillaient à leur guise.
Une poupée ne donne pas son avis, une poupée est toujours satisfaite de plaire à sa propriétaire.
Et après un temps infini passé à me faire habiller, nous ressortions ma mère et moi, elle ravie de ses achats et moi désespérée à l’idée de porter ses vêtements si opposés à ceux que j’aurais souhaité.
Cette petite fille modèle, ou du moins son image, était totalement étrangère à moi-même. C’est sans doute un des éléments déclencheurs à ma sempiternelle rébellion contre l’injonction parentale.
Je peux vous dire que, niveau fringues, depuis l’adolescence j’ai pris ma revanche et que c’est sans doute aussi, à contrario des espérances maternelles, ce qui a forgé depuis lors, ma façon, un peu singulière, parait-il, de m’habiller !!!
Inutile aussi de préciser que le bleu marine, le blanc et le rouge sont plus que minoritaires, voire inexistants, dans ma garde-robe…choc mais pas du tout chic…
Enfin, à ce propos, tout est une question de point de vue , n’est-ce pas ?!
Hihihi!!!
Ah , nos mères et nous...un poème d'amour...mais qui laisse des traces et nous définit en partie!
Ben comment dire, la mienne me faisait faire le petit singe savant devant ses amis.Je devais faire la révérence pour dire bonjour. Ca n'a pas duré longtemps, me suis refusée à faire le cirque assez rapidement.