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     Graines d'histoires

Photo du rédacteurMarie Wermuth

La consigne


J’ai reçu une consigne d’écriture, un beau prétexte, pour sûr !

La voici :

Petit texte libre, avec pour contrainte d'inclure les mots suivants:

tartine, levure, extincteur, volcans, pomme, valide, réunion, gaz.




La dernière séance de groupe fut animée, pour ne pas dire explosive mais une fois de plus, je m’en suis un peu échappée…contre ma volonté !


Comme chaque mardi, la réunion avait lieu dans la salle du sous-sol de l’institution.

Je me suis toujours demandée si ce choix était justifié par le fait de nous laisser nous exprimer en toute liberté, sans contrainte ni peur de déranger les autres résidents ou s’il était plutôt de l’ordre d’une mise à l’écart déguisée, histoire de protéger une ambiance se voulant paisible et feutrée !


Toujours est-il que, comme chaque mardi, le Docteur Jorge ouvrant la marche, nous descendons l’escalier en rang serré jusqu’à la porte désignée toujours fermée à clef.


Le rond de chaise est installé, chacun prend place comme à l’accoutumée et même si le docteur ne cesse de nous répéter qu’il serait bien de permuter, histoire de ne pas voir le monde toujours du même côté, pense-tu, chacun reprend sa chaise comme si son nom était marqué dessus !


Nous sommes huit et aujourd’hui comme souvent, je sens que ça va être olé-olé!

Y’a du gaz dans l’air, ils sont tous excités et ils me font penser à un volcan prêt à exploser.

J’ai un peu peur et comme on ne sait jamais ce qui va se passer, moi j’ai pas envie de finir en fumée alors je m’assieds toujours près du mur où l’extincteur est accroché ! Je n’ai aucune idée de comment l’utiliser, je l’avoue, mais ça me rassure et je suis moins angoissée.

Cela dit moi aussi, aujourd’hui, je suis bien remontée, prête à tout faire valser si la moutarde me monte au nez !


Le Docteur Jorge ouvre la séance sans tarder, avec douceur mais fermeté. L’ambiance du jour est agitée, on sent que ça bouille de tous côtés, ça sent le roussi, ça va péter !


Assise entre Germaine et Adolf, ces deux -là me toisent avec un petit air de supériorité comme si j’étais la folie incarnée !

Germaine, à peine posée, se penche vers Adolf pour discuter sans même me calculer.

Plusieurs fois je leur ai dit de se mettre à côté, que ce serait bien plus simple pour se parler, mais pas moyen de les faire changer, leur place c’est leur place et point barre c’est plié !

Le Docteur Georges a beau les tancer, rien n’y fait, ces deux-là défient volontairement l’autorité…je crois qu’il a décidé de laisser quimper car il semble voir du sens dans cette complicité !

Du coup, je me retrouve toujours coincée entre eux deux … à force, je m’y suis faite alors bonne pâte et pour ne pas m’énerver - le Docteur Jorge dit qu’c’est pas bon pour ma santé - je laisse filer…

Leur conversation finit par me bercer, je sens que je décroche…

Et me voilà partie dans mes pensées…


Pâte…

Tarte…

Ô ! Comme j’adorais regarder ma mère préparer sa fameuse tarte avec les pommes du verger.

Elles étaient belles nos pommes, d’un jaune presque doré, pas comme celles du supermarché avec leur effet ciré et leur date de péremption tamponnée.

Les nôtres étaient valides toute l’année, juteuses et goûtues à souhait et croyez-moi tout le monde en raffolait !

Bref, je me revois dans la cuisine, m’agrippant à son tablier pour grimper sur le tabouret et l’aider à malaxer…Mélanger la farine, le beurre, les œufs, une pincée de levure et le tour est joué.

Mes mains à ses mains mêlées, joyeusement on pétrissait du bonheur à partager. Parfois j’avais même le droit à une petite tartine de beurre sucrée pour me faire patienter….


Patienter….la conversation de Germaine et Adolf a cessée et j’entends le Docteur Jorge recadrer l’assemblée, la séance a l’air enflammée …

Retour à la réalité… parfois un peu délicate à affronter !

Le Docteur Jorge dit que mon problème à moi c’est d’être souvent perchée et qu’il est là pour m’aider à m’enraciner.

Je l’aime bien ce médecin !

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